La crise énergétique actuelle entraîne une augmentation des prix de l’électricité et du gaz sans précédent, frappant gravement les collectivités qui doivent faire face à une explosion de leurs dépenses énergétiques.

Face à ce constat, bon nombre de collectivités n’hésitent pas, dans l’urgence, à éteindre leurs installations d’éclairage extérieur en cœur de nuit pour atténuer, voire compenser, la hausse de leur facture d’énergie. Cette solution d’urgence doit se faire en toute responsabilité, connaissance et analyse des usages des espaces extérieurs et des contraintes techniques du matériel installé.

L’arrêt partiel doit être réfléchi et ne peut être considéré à lui seul comme la solution à long terme. Il doit s’accompagner d’une rénovation complète des installations. La définition d’un schéma directeur d’aménagement (ou de cohérence) lumière permettra de définir la politique « éclairage » de la ville en fonction des usages et de l’environnement. Les nouvelles technologies d’éclairage contribueront à une rénovation de qualité tout en répondant aux appels du gouvernement à la sobriété énergétique.

L'éclairage public : un service dû aux usagers

La nuit, en extérieur et en milieu urbanisé, « voir et être vu » est un droit pour tous les citoyens. Qu’il s’agisse de la poursuite des activités diurnes ou d’activités spécifiques nocturnes, la sécurité, objective et subjective, doit pouvoir être assurée en permanence et permettre à tous les usagers de circuler sur l’espace public : véhicules motorisés, cyclistes, piétons et autres usagers des mobilités douces. L’éclairage doit également faciliter l’efficacité d’intervention des services d’urgences (police, gendarmerie, santé, interventions techniques d’urgence pour le gaz, l’électricité…).


ECLAIRAGE PUBLIC : A QUOI LE MAIRE EST-IL TENU ?

Conformément à l’article L2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le maire a pour mission de veiller à « la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques », ce qui comprend notamment « l’éclairage des voies publiques situées dans l’agglomération communale, y compris de celles dont la commune n’est pas le maître d’ouvrage (routes nationales, routes départementales à l’intérieur des agglomérations) » suivant l’article L. 2213 1 du CGCT. Le maire doit ainsi veiller à ce que l’éclairage mis en place soit suffisant pour signaler tout danger particulier.

C’est au regard de ces éléments, que le juge administratif examinera si l’absence ou l’insuffisance de l’éclairage public est constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité de la commune (sous réserve que l’imprudence ou la faute de la victime soit de nature à exonérer la commune de tout ou partie de sa responsabilité). Dans une réponse à un sénateur, le Ministère de l’Intérieur précise que « l’éclairage public ne saurait être supprimé sur l’ensemble du territoire de la commune. Il appartient au Maire de rechercher un juste équilibre entre les objectifs d’économies d’énergie et de sécurité afin de déterminer les secteurs de la commune prioritaires en matière d’éclairage public au regard des circonstances locales. Dès lors qu’il serait ainsi en mesure de démontrer qu’il a accompli toutes diligences, le Maire ne devrait pas voir sa responsabilité reconnue » (JO Senat / 1er octobre 2015) En cas de mise en cause de la responsabilité du maire, il est nécessaire d’apporter la preuve d’un entretien et du fonctionnement normal des installations d’éclairage public lors des faits (cf. L. 2321-2 du CGCT et le Cadre juridique de l’éclairage public - Sénat (senat.fr)).


LE BESOIN D’ÉCLAIRAGE

Le choix d’éclairer ou non tout ou partie d’une commune, durant la nuit entière ou uniquement pendant certaines heures, est une décision qui se base sur la connaissance des flux d’usagers sur la commune (vie nocturne, travail de nuit…), de leur évolution dans le temps (évolutions journalières, hebdomadaires, voire saisonnières), des enjeux environnementaux et sur l’acceptation des citoyens.

Chaque territoire a son identité. Que ce soit à l’échelle d’une rue, d’un quartier, il est nécessaire de tenir compte des caractéristiques des espaces à éclairer. Aujourd’hui, l’offre technologique en éclairage public, en accord avec la norme fixant les performances à respecter (cliquez ici pour plus d’informations sur la norme de performance NF EN 13201), et la règlementation sur la maîtrise des nuisances lumineuses, permettent d’atteindre les objectifs d’économie, réduisant de manière drastique à la fois les consommations d’énergie et les nuisances dues aux luminaires d’éclairage extérieur, qu’ils soient installés sur des espaces publics ou privés, et ce, en favorisant des performances lumineuses indispensables à la sécurité et à la qualité de vie que les citoyens sont en droit d’attendre.

Éclairer juste n’est pas juste éclairer. Concilier toutes les contraintes ne se règle pas avec des positions dogmatiques mais nécessite une analyse pertinente et objective des besoins afin de faire les meilleurs choix.

Éteindre en cœur de nuit : une décision raisonnée

Le choix des zones à éteindre en cœur de nuit va dépendre des territoires, de leur fonctionnement nocturne, de leurs typologies urbaines. Mais, certains lieux peuvent logiquement faire l’objet d’une première réflexion cet hiver :

• Les mises en lumière

• Les lieux qui n’ont que très peu d’activités nocturnes en fin de soirée :

- les lotissements (si la gestion de l’éclairage est publique)

- les parkings publics liés à des activités diurnes ou de début de soirée (possibilité de mettre en place de la détection de présence, si éclairage compatible)

- les zones d’activités où il y a peu ou pas de fréquentation en cœur de nuit, après concertation avec les entreprises

- les zones commerciales après fermeture, après concertation avec les commerces (rappel : les parkings liés à une activité commerciales doivent être éteints 2 heures après la fin de l’activité).

- les infrastructures à seule vocation motorisée en zone péri-urbaine (à l’exception des zones dites de « conflit » comme les carrefours routiers, les pistes cyclables non séparées des routes motorisées, ...).

• la suppression des points lumineux superflus (éclairage en retour, ambiance en complément d’un fonctionnel si non justifié, plusieurs luminaires sur 1 support, …).


L’AFE déconseille l’extinction d’un point lumineux sur deux qui remettrait en cause l’uniformité de l’éclairage de la zone qui deviendrait accidentogène.

Pour éteindre l’éclairage pendant une partie de la nuit, des précautions techniques sont à prendre :

Il est impératif au préalable de modifier techniquement les installations actuelles qui, dans la plupart des villes de France, ne sont pas conçues pour être modifiables « à l’heure ». L’éclairage public peut s’allumer soit par une horloge astronomique, programmable ou non, soit par un système de pilotage à distance pouvant tenir compte de la luminosité réelle locale. Actuellement, l’éclairage public s’allume souvent suivant un calendrier astronomique préréglé pour gagner en fiabilité, en simplicité et économies de gestion. Il faut ajouter une horloge dans chacune des armoires d’alimentation, si ces dernières n’en sont pas pourvues, afin de permettre cette extinction temporaire. Un deuxième contact avec modification de câblage permet de délester certains circuits pour une extinction temporaire.

Sur les installations équipées d’horloges astronomiques programmables, des horaires d’extinction particuliers doivent être mis en place, par circuit d’installation à l’armoire de commande ou sur la totalité de l’armoire sans ajout d’horloge supplémentaire.


Dans tous les cas (modification de programmation ou ajout d’horloge), des travaux de modification de câblage peuvent s’avérer nécessaires afin de différencier les secteurs à laisser en service et ceux à éteindre si ce choix est retenu. Cela peut être le cas par exemple si une voie principale en entrée de ville (giratoire, …) est alimentée en même temps qu’un lotissement et que le Maire souhaite laisser cette entrée de ville éclairée.

Sans rentrer dans les détails techniques, le matériel d’éclairage est conçu pour fonctionner en continu pendant des nuits entières. Multiplier (par deux) le nombre d’extinctions et d’allumages engendre un vieillissement prématuré de plusieurs composants (diminution de la vie théorique des lampes à décharge d’environ 25 %) et double les plages de surconsommation au démarrage.

Pour les collectivités qui ont dernièrement investi dans des technologies LED assorties de systèmes de gestion, la variation de l’intensité lumineuse en fonction du profil nocturne de la ville permet de faire jusqu’à 75 % d’économies d’énergie. Dans certains cas, l’extinction en cœur de nuit est moins économe qu’un abaissement de puissance avec des luminaires source LED possédant un profil nocturne dynamique, sur des plages horaires élargies.

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