Discours prononcé à l’occasion de la manifestation organisée par le centre régional de l’AFE « Hauts de FRANCE », le FDE80, la ville d’Amiens et Amiens Métropole le mercredi 15 mars 2017. Amiens Métropole a été récompensé par les Trophées de l'éclairage innovant AFE / ID Efficience Territoriale en 2016 dans la catégorie Mise en valeur du patrimoine.
Il y a à peine quelques jours, Amiens vibrait du murmure des poètes rassemblés dans le cadre de la journée nationale de la poésie pour laquelle nous avons été récompensés, et croyez bien que nous sommes sensibles à ces prix qui rappellent que la ville est un corps vivant avec un langage urbain fait de vibrations, de pulsations, de frissons, de colorations selon ses émotions.
A cet instant, comme celui qui nous rassemble aujourd’hui, nous avons ressenti que la ville a une Âme et qu’il s’agit de la révéler.
Il y a d’un côté le corps urbain, celui qui emprunte à l’anatomie : le cœur de la ville, ses artères, son centre névralgique, sa colonne vertébrale, sa sève fluviale...
Le souci du Maire est de chercher à en assurer une saine physiologie, c’est-à-dire la santé de la ville.
Cela consiste à éviter les thromboses, faciliter les circulations, faire battre un cœur commercial, irriguer les membres de sa périphérie, lui donner des couleurs et des lumières.
Parce que, par-delà ce qui relève de la santé du corps urbain, de son confort, de son unité, de l’harmonie des quartiers, il s’agit, à l’instar de l’émotion poétique, de donner une Âme à la ville.
Combien de fois entendons-nous dire d’une ville qu’elle est sans Âme ? Combien de fois entendons-nous réclamer ce supplément d’Âme qui est nécessaire à la vie ?
Une ville sans Âme, c’est une ville sans soins et sans attentions.C’est une ville considérée comme un matériau, comme un physique et non pas comme un corps vivant.
Ce mot Âme est indescriptible. Cependant, combien il est important aujourd’hui dans notre monde mécanisé, organisé, standardisé, administré, cadré, réglementé ; il nous faut rétablir ou greffer une Âme.On ne la voit pas, elle est impalpable mais elle se trouve dans la sensation du bonheur sous un rayon de soleil, sous un trait de lumière dans un square, dans la portée lumineuse d’un alignement des rues, dans la mise en évidence colorée d’une architecture, dans la caresse et la tendresse d’un arrangement lumineux urbain.
Elle est encore dans la piétonisation dont les lumières des candélabres se penchent pour éclairer les pas qui favorisent la flânerie, la rencontre, la déambulation nonchalante...
Mais il fait encore jour, la nuit va arriver.
La nuit est étrange, elle est le lieu des paradoxes, celui des peurs et des songes, celui des craintes et des rêveries.
Instinctivement, on lève les yeux, on cherche les lumières de la nuit étoilée mais l’écran est étroit, rétréci par les cimes des immeubles et l’organisation architecturale. Alors, il s’agit de descendre la lumière de la lune et des étoiles, de les prendre au ciel pour mettre en scène la rue, les monuments, la ville, la Vie.
C’est à cet endroit que la lumière révèle sa magie et donne à la vie nocturne le vocabulaire de la fête, du loisir, du romantisme.
Ces quelques mots pour vous dire combien sont importants les éclairages dans la cité, particulièrement quand le monde s’assombrit des inquiétudes et des angoisses, quand les nuages noirs et les violences ternissent les esprits. Poètes, artistes, gens de scène et de théâtre savent l’importance des jeux de lumière.
Je note d’ailleurs l’apparition d’architectes de lumières comme à Notre-Dame-d’Amiens, dont la polychromie lumineuse a ébloui le monde entier.
Je songe à la Canopée de la gare et sa forêt de lumières.Je songe à la Tour Perret et son phare multicolore.Et bien sûr, l’éclairage de notre Hôtel de Ville qui sait adapter ses coloris en fonction des événements du calendrier.
Demain, d’autres lumières accompagneront le BHNS, d’autres lumières souligneront l’identité de certains quartiers, d’autres lumières créeront le miroir de la Somme pour le plaisir des noctambules.
Sont révolus les temps des mornes alignements de lumières froides, de lumières cliniques comme projetées sur un corps mort.
Sont venus les temps des lumières chaudes, le temps de la sophistication, celui des lumières tamisées, variées, changeantes, chatoyantes, le temps des lumières douces et intimistes pour nous raconter la beauté de la vie la nuit.
Mesdames, messieurs les concepteurs, vous y contribuez, vous changez la vision avec vos conceptions lumineuses.Elles correspondent à mes exigences. Avec nous, vous devenez les magiciens d’un nouveau langage qui agit favorablement sur les comportements et révèle l’Âme de la ville.
Raoul Dufy a peint la Fée Electricité ; aujourd’hui, je salue la Fée Lumière et les acteurs de cette poésie lumineuse qui transmue une belle endormie en ville éveillée pour émerveiller les yeux et les cœurs.